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Gabon : histoires d’eau

La Seteg doit réaliser un réseau de canalisations de 40 km entre Ntoum et Libreville. © Tiphaine Saint-Criq pour Jeune Afrique
Une société privée gère l’eau et l’électricité du pays. Avec des résultats médiocres. Mais l’État gabonais reprend la main.

Le 10 novembre, le Gabon inaugurait le stade de l’Amitié d’Angondjé, près de Libreville, par un match de football (opposant la sélection nationale au Brésil) qui a bien failli ne pas avoir lieu. Faute d’éclairage. Encore un mauvais tour dû aux fréquentes coupures d’électricité. Aussi récurrentes que les interruptions de distribution d’eau courante. Les critiques visent un seul coupable : la Société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG), filiale à 51 % du français Veolia.

En 1997, l’État gabonais a confié la gestion de la SEEG au groupe français. Mais le contrat de concession est devenu depuis deux ans le symbole d’un partenariat public-privé raté. « Dans le cahier des charges, nous avons négligé de préciser le sens des investissements que la SEEG devait effectuer », reconnaît Régis Immongault, ministre de l’Énergie.

Débordé

Aux yeux des Gabonais, l’opérateur ne se montre pas assez offensif – comprenez « n’investit pas suffisamment » –, surtout dans l’hydraulique. La SEEG concentre l’essentiel de ses efforts sur la gestion et la maintenance des centrales thermiques existantes ou, au mieux, l’augmentation de leurs capacités. Ainsi, celle de Lambaréné (Moyen-Ogooué) a bénéficié de l’installation de groupes diesels neufs de 1 600 kW en 2010, et celle d’Owendo, près de Libreville, voit réhabiliter ses turbines à gaz.

Chez Veolia, on se défend de ne pas avoir respecté le contrat : « À l’origine, il était prévu que la demande en eau et en électricité augmente de 2,5 % à 3 %, explique un responsable de la filiale. La réalité est tout autre : on est davantage proche de 6 % à 8 %. Et les budgets disponibles ne sont plus du tout adaptés. » L’entreprise s’efforce néanmoins de remplacer les moteurs qui fonctionnent au fioul par des turbines à gaz. Ce dernier sera bientôt acheminé, depuis Port-Gentil, par Perenco. Ce qui permettra à la SEEG de baisser de 3,5 % ses coûts de production et, dans le même temps, de dégager des moyens supplémentaires pour investir davantage.

Réactualisation

Critiqué lui aussi sur ce dossier sensible, le gouvernement avait décidé, en décembre 2009, de réviser ce contrat, qui lie l’État gabonais à la SEEG jusqu’en 2017. En avril 2010, le cabinet Deloitte au Gabon a été chargé de mener un audit dont les résultats, remis en février 2011, n’ont pas entraîné la rupture dudit contrat, mais des promesses de réactualisation.

Au bout du compte, l’audit semble avoir motivé le retour en première ligne de l’État dans la fourniture des services de base. Ce dernier entend exercer plus de contrôle sur le concessionnaire, et l’annonce de son entrée, en tant qu’actionnaire majoritaire, dans le capital de la Société d’électricité, de téléphone et d’eau du Gabon (Seteg) va dans le même sens.

Recadrage

Les dettes de l’État envers la Seteg – 11,5 milliards de F CFA (17,5 millions d’euros) – ont été apurées et, pour améliorer plus rapidement l’offre en eau potable, une enveloppe de 94 milliards de F CFA vient d’être débloquée. Au programme, notamment, la réalisation d’un réseau de canalisations de 40 km entre Ntoum et Libreville (par la Seteg) et d’une septième station de pompage à Ntoum (par la SEEG) pour 60 milliards de F CFA ; la pose d’une autre conduite entre le camp De-Gaulle (Libreville) et Angondjé, où va être construit un nouveau château d’eau (par la Sogea, filiale du français Vinci), pour 12 milliards de F CFA ; et des travaux effectués par la Seteg pour renforcer les capacités de production et de distribution d’eau dans certaines localités de l’intérieur (12 milliards de F CFA). Une étude sur le réseau de distribution d’électricité du Grand Libreville est également prévue.

La reprise en main va même plus loin, avec la création d’une agence de régulation des secteurs de l’eau et de l’électricité, véritable signal d’un renforcement de l’autorité administrative et d’une plus grande ouverture à la concurrence. Un fonds de financement des infrastructures a également été créé, de même qu’une société de patrimoine. Cette dernière aura pour objet la gestion, pour le compte de l’État, des biens et droits affectés au service public de l’eau potable et de l’électricité.

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Directeur général de la Camerounaise des eaux

La Camerounaise des eaux (CDE) est une coentreprise entre les marocains Onep, Delta Holding et la Caisse de dépôt et de gestion. Retour sur ses trois ans de collaboration avec la compagnie nationale camerounaise, la Camwater.

Jeune Afrique : Le Cameroun est à la traîne en matière d’accès à l’eau potable…

BRAHIM RAMDANE : C’est en effet un motif de préoccupation pour les populations, Yaoundé en particulier subissant une forte pénurie. Pour y remédier, le gouvernement a entrepris de renforcer la desserte dans une centaine de centres d’affermage à travers le pays, dont la mise en service, engagée depuis 2009, doit se poursuivre jusqu’en 2015. L’objectif est de porter le taux d’accès à l’eau potable en milieu urbain de 35 % à 60 %.

Plusieurs projets, d’un montant total estimé entre 300 milliards et 400 milliards de F CFA [entre 457 millions et 610 millions d’euros, NDLR], sont en cours, dont un programme d’adduction d’eau à Yaoundé et dans trois villes secondaires. La construction d’une usine d’eau potable sur la Mefou, d’un coût évalué à 72,2 milliards de F CFA, doit notamment permettre d’augmenter de 50 % la production d’eau à Yaoundé, pour passer de 100 000 à 150 000 m3 par jour. À Douala, la réhabilitation des infra­structures et la création de nouveaux équipements de production ont déjà permis de porter la production journalière à 180 000 m3 par jour.

Comment s’articule le partenariat avec l’État ?

L’Onep [Office national de l’eau potable marocain] intervient dans le cadre d’un contrat d’affermage, sa filiale, la CDE, étant désignée comme société d’exploitation, aux côtés des principaux acteurs nationaux que sont le ministère de l’Énergie et de l’Eau et la Cameroon Water Utilities Corporation [Camwater].

La CDE apporte son expertise technique pour la gestion de l’eau potable, le renouvellement de l’outil industriel et le développement du secteur. La Camwater s’occupe, elle, du volet investissement. Ce schéma de partenariat présente l’avantage d’être jugé crédible par les bailleurs de fonds. Trois ans après l’arrivée de l’Onep, sur un programme d’investissement de plus de 300 milliards de F CFA, la Camwater en a déjà mobilisé les deux tiers.

Quelles sont les répercussions pour les populations ?

Notre partenariat a permis au pays d’améliorer son offre. La qualité de l’eau est meilleure, les délais d’attente pour les branchements ont été réduits de plusieurs mois à deux ou trois semaines. La densification du réseau aidant, le nombre de clients a nettement augmenté. L’activité d’assainissement de base reste en revanche embryonnaire, mais des projets sont à l’étude, et la CDE pourrait être sollicitée.

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Propos recueillis par Clarisse Juompan-Yakam

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