Le Mvett est vraiment un art total comme tenait à le démontrer Tsira Ndong Ndoutoume et vient de le prouver Jean-Paul Ollomo qui s’est attelé à mettre à la disposition de la communauté universelle un nouvel ouvrage qui va certainement ouvrir une nouvelle page dans l’histoire de la célèbre épopée.
« Le livre est écrit de telle sorte que ceux qui n’ont jamais écouté ou lu un texte de Mvett ne s’y perdent pas » a indiqué Omer Ntougou en présentant l’ouvrage qui fait la curiosité du Gabon littéraire et de la communauté ‘mvettologue’ aujourd’hui. « Akoma Mba et les Immortels » est d’abord une fiction. Une fiction qui met en scène le monde d’Engong et ses héros dont le premier est incontestablement Akoma Mba, un chef mystérieux qui fait languir tous les mortels (Okü) puisqu’il détient le secret de l’immortalité. Une fiction qui est écrite dans les genres épique et fantastique qu’imposent l’épopée Mvett. Une fiction surtout qui révèle au monde que la culture négro-africaine et notamment fang est capable d’apporter au monde des héros aussi sulfureux qu’extraordinaires.
L’exercice de Jean-Paul Ollomo est majestueux et pédagogique en ce qu’il a créé un texte qui tient de la métaphysique et de la mystique sans en référer tout en ouvrant au monde des choses tenues longtemps secrètes par les fangs. «Le livre est complètement épuré […] La thèse d’Ollomo est de dire que le Mvett nous donne un matériau dont on peut se servir pour écrire des textes » a relevé, Omer Ntougou, orateur averti puisque issu d’une famille de conteurs reconnus. Un « texte épuré » dans la mesure où dès les premières pages du livre, les Immortels d’Engong tels qu’Akoma Mba, Embwang Ondo Mba, Ntoutoume Nfoulou ou Zé Medang, sont mis en scène alors qu’en réalité le récit du Mvett-Oyeng impose une démarche initiatique qui permet au conteur de se présenter à ceux qui l’écoutent et donc de révéler son identité à travers ses généalogies familiale et initiatique. Il en est ainsi pour ceux qui content ou ont conté seulement au corps de garde, nous citerons entre autres Tsira Zué Nguema, Edou Adè, Akué Obiang ou Mvom’Eko. Il en est ainsi également pour ceux qui ont fixé le Mvett sur le papier tels Tsira (Philippe) Ndong Ndoutoume, auteur de trois œuvres dont « L’Homme, la Mort et l’Immortalité » et Daniel Assoumou Ndoutoume avec son « Essai sur la Dynastie Ekang N’nah ». Tous ont toujours dit leurs généalogies familiales (Edan’Ayong) et leurs généalogies initiatiques qui les ramènent tous à Oyon’Adè qui reçut le Mvett.
Mais dans l’œuvre de Jean-Paul Ollomo, aucune généalogie. Ce qui fait naturellement dire au jeune auteur que « je ne me considère pas comme un conteur car je n’ai jamais été enseigné par un maître». Une mise au point nécessaire qui n’efface pas le fait que désormais Ollomo est un Immortel de par son ouvre selon les mots mêmes de Steeve Elvis Ella, conférencier. « Jean-Paul Ollomo entre dans le monde des immortels car il vient de produire une œuvre romanesque qui fera qu’on parlera désormais d’un avant et d’un après-Ollomo, parce que avant lui le Mvett n’était conté que par des initiés qui déclamaient leurs généalogies au commencement et à chaque moment important du récit », ainsi Tsira Ndon Ndoutoume disait « je suis Ndong Ndoutoume ; j’ai pris le Mvett chez le grand maître Zué Nguema… ».
Pour ce qui est simplement du roman publié aux Editions Baudelaire, il tient en ce qui a toujours fait l’essentiel du récit Mvett à savoir la quête de l’immortalité par les peuples d’Okü. Un jour, alors qu’Akoma Mba en était venu à un combat mortel contre son ‘frère’ Obame Andome, les descendants d’Ekang N’na devinrent immortels mais décidèrent de ne pas partager le secret de cette immortalité avec tous les autres clans et familles. Jean-Paul Ollomo alimente ainsi son récit de combats épiques, d’anecdotes, d’humour et de sensations qui rappellent aisément les combats des Mangas japonais dont Dragon Ball Z, dans lequel la quête des sept boules de cristal donne aussi lieu à un combat permanent pour l’immortalité.
« Akoma Mba et les Immortels » est une œuvre originale qui a certainement le don de rendre accessible à de nombreuses générations une épopée qui a résisté au temps et aux influences comme si l’une des promesse à Oyon’Adè, quand il reçut le Mvett, était aussi que « le Mvett survivra au temps quand l’oralité commencera à disparaître ».
