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3 mois de prison pour avoir couvert une conférence de presse

Reporters sans frontières déplore la décision de la justice béninoise qui a condamné, le 16 janvier 2013, à trois mois de prison ferme, la directrice de la chaîne de télévision privée Canal 3, Berthe Cakpossa. Cette dernière doit également s’acquitter d’une amende de 500 000 Francs CFA (762 euros) et d’un franc symbolique de dommages et intérêts en faveur du président de la République.

La directrice de Canal 3 a immédiatement fait appel de ce jugement, et a été laissée en liberté. Elle est accusée d’«offense au chef de l’État» pour avoir diffusé, le 18 septembre 2012, la conférence de presse d’un ancien conseiller et porte-parole de la présidence qui affirmait que Boni Yayi souhaitait s’accrocher au pouvoir et que son entourage était corrompu.

«Trois mois de prison ferme : c’est la peine que peut vous valoir, au Bénin, la couverture d’une conférence de presse mettant en cause le chef de l’Etat. L’omniprésence de Boni Yayi dans le traitement de ce dossier est anormale. Elle semble indiquer un règlement de comptes et avoir eu une influence directe sur la sanction énoncée», a déclaré l’organisation.

«Le fait que l’organe de régulation des médias manque d’indépendance, que la justice sévisse contre la presse, et que des journalistes puissent être condamnés à de la prison dans l’exercice de leur profession est préjudiciable à l’image du Bénin. RSF est d’autant plus préoccupée que, sans de tels incidents, le pays pourrait figurer parmi les États africains les plus performants en matière de liberté de la presse. Aujourd’hui, il en est loin», a ajouté Reporters sans frontières.

Au cours de la conférence de presse du 18 septembre 2012, Lionel Agbo, ancien conseiller et porte-parole de Boni Yayi, avait affirmé que le chef de l’État envisageait de «s’accrocher au pouvoir» en se présentant, à l’encontre des dispositions constitutionnelles, pour un troisième mandat.

Canal 3 est le seul média béninois à avoir diffusé cette conférence de presse dans son intégralité. Selon la loi béninoise, c’est dans la propagation des allégations portées contre le président Boni Yayi que réside l’offense. Berthe Cakpossa est donc l’accusée principale dans cette affaire, alors que Lionel Agbo est poursuivi pour «complicité». Il a été condamné à six mois de prison ferme.

La conférence de presse avait également été l’occasion pour Lionel Agbo de dénoncer la corruption de l’entourage du président. L’ancien conseiller affirmait : «Dans ce palais (présidentiel) que je connais, il y a des hommes et des femmes qui ont fait fortune. Un petit groupe est devenu milliardaire et le chef de l’Etat sait que je sais qu’il sait…» Pour ces allégations, Berthe Cakpossa et Lionel Agbo ont tous deux été acquittés.

En novembre 2012, deux émissions de Canal 3 avaient été suspendues pour trois mois par la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC). Dans une lettre datée du 19 septembre, le Président demandait à cet organe de régulation de prendre des sanctions à l’encontre des émissions L’arbre à Palabres et Actu Matin en les comparant à la Radio Télévision Libre des Milles Collines, tristement célèbre pour son rôle dans le génocide rwandais de 1994. Le président Boni Yayi faisait en outre référence à la diffusion de la conférence de presse de Lionel Agbo par Canal 3 en qualifiant cette démarche de «troubles à l’ordre public» et en réclamant une peine de six mois de prison avec sursis pour la directrice de la chaîne.

Rappelons qu’au Gabon, le chef de l’État s’est engagé en début d’année à dépénaliser les délits de presse, insistant sur le fait que le Gabon n’avait pas de journaliste en prison depuis 2009, date d’accession d’Ali Bongo Ondimba à la fonction de président de la République.

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