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5 mois d’emprisonnement et 200 000 francs CFA d’amende pour Dimitri Louba

La-LoupeTraduit en justice par le directeur général du Budget, Yves Fernand Manfoumbi, pour «diffamation par voie de presse», le directeur de publication journal La Loupe, Dimitri Louba, a écopé, ce mercredi 13 mars 2013, d’une peine d’emprisonnement de 5 mois avec sursis, assortie de 200 000 francs d’amende à payer au Trésor public et 5 millions de francs de dommage et intérêt à payer au plaignant.

Traduit en justice par le directeur général du budget, Yves Fernand Manfoumbi qui estime avoir été diffamé à travers un article intitulé «Enrichissement ostentatoire, Manfoumbi est-il un petit ou grand voleur ?», le journal La Loupe a quasiment écopé de ce qu’exigeait, le 25 février, Me Jean-Paul Moumbembé, avocat du plaignant : 50 millions de francs CFA de dommages et intérêts pour son client.

Au terme du jugement dont le verdict a été rendu ce 13 mars, La Loupe a été condamnée à 5 mois de prison avec sursis, 200 000 francs d’amende à verser au Trésor public et 5.000.000 de francs CFA de dommage et intérêts à payer à Yves Fernand Manfoumbi.

Joint au téléphone, l’avocat de Dimitri Louba, Me Bretrand Homa Moussavou, estime que «cette décision est une décision de principe. Mais le principe en tant que tel a été incurvé parce que, quelque part, le véritable principe est celui de la présomption d’innocence et par voie de conséquence en ce qui concerne les journalistes, c’est celui de la liberté de la presse. Plutôt que d’affirmer le principe de la liberté de la presse, on a préféré la peine de principe en s’abstenant de renvoyer l’intéressé dans les prisons, c’est-à-dire de le condamner à une peine ferme».

«Je pense pour ma part que l’intéressé n’aurait pas dû être condamné parce que j’estime qu’il n’y pas diffamation par voie de presse dans ce cas présent dans ces conditions-là. Tout journaliste a le droit de ne pas divulguer sa source. Il faut décourager ce genre d’initiative au pénal», a-t-il ajouté avant de confirmer qu’il fera appel pour que la liberté de la presse puisse triompher.

Si les 15 jours de prison ferme contre Dimitri Louba, requis le 25 février 2013 par le procureur de la République, ont été remplacés par cinq mois de prison avec sursis et 5,2 millions de francs à débourser par le journal, la sanction est pour le moins trop lourde pour un titre connu pour sa liberté de ton. Durant cinq mois en effet, une épée de Damoclès sera suspendue sur le titre dont on scrutera le moindre dérapage pour obtenir l’emprisonnement de l’auteur de l’article. Ce qui n’est autre chose qu’un bridage de sa ligne éditoriale. De plus, étant connu que les entreprises de presse ne sont pas du tout rentables au Gabon, l’amende de 5 millions de francs CFA passe pour un artifice devant pousser l’hebdomadaire à mettre la clé sous le paillasson.

La sanction est d’autant plus sévère que le directeur général du Budget n’est pas clairement indexé par l’article incriminé vu qu’il n’est pas le seul Manfoumbi du Gabon. Il dispose même un parfait homonyme, en la personne du pasteur, bien connu, répondant au nom d’Yves Manfoumbi. La sévérité des juges pourrait laisser penser qu’ils évoluent en dehors du contexte gabonais, dans lequel le président Ali Bongo se soucie de l’amélioration de la liberté de la presse, et dont l’organisation Reporter sans frontières a indiqué l’urgence «de supprimer des délits de presse à la définition nébuleuse, d’introduire de la clarté dans l’application des délits tels que la diffamation et l’injure». Quelle suite le tribunal va-t-il donner à cette affaire qui va nécessairement aboutir en Cour d’appel ? Ne se dirige-t-on pas vers la censure de tous les journaux un peu trop indépendants aux goûts de certains censeurs et donc à une rétrogradation du processus démocratique au Gabon ?

Alexis de Tocqueville demandait en effet d’assurer l’existence et l’indépendance de la presse dont la tâche première est de rendre publics pour tous faits et opinions. «C’est elle dont l’œil toujours ouvert met sans cesse à nu les secrets ressorts de la politique, et force les hommes publics à venir tour à tour comparaître devant le tribunal de l’opinion.» Le journal La Loupe ne voulait vraisemblablement que s’en tenir à ce rôle.

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