L’ancien président centrafricain, François Bozizé, a rompu le silence, le 2 avril2013 sur les antennes de la BBC Afrique, depuis son lieu d’exil provisoire, le Cameroun. Le président évincé le 24 mars dernier a accusé le Tchad de l’avoir lâché et d’avoir soutenu les rebelles de la Séléka qui ont pris le pouvoir à Bangui grâce aux «forces armées tchadiennes» qui sont à l’origine de l’attaque contre la base sud-africaine à Bangui.
En janvier dernier, sur la requête de l’ancien président centrafricain, l’Afrique du Sud avait envoyé 298 soldats en Centrafrique, en plus de la vingtaine déjà présente en vertu d’un accord de coopération militaire datant de 2007 sur la formation des troupes locales. Mais samedi 23 mars au soir, 13 soldats sud-africains avaient trouvé la mort lors d’un affrontement avec les troupes de la Séléka. Pour François Bozizé qui s’exprimait sur les antennes africaines de la BBC, il n’y a pas de doute : «le samedi 23 (mars) nous avons anéanti les forces de la Séléka mais cependant dans la nuit du samedi 23 au dimanche 24 nous pourrions affirmer qu’il a eu un soutien d’un pays africain, je crois bien inévitablement, le Tchad», a affirmé le président déchu avant d’ajouter qu’il s’agissait notamment des «forces spéciales des forces armées tchadiennes qui ont mené l’opération dans la matinée du dimanche puis ont attaqué la base des Sud-africains qui se trouvaient sur l’itinéraire vers Bangui».
Pourtant, le Tchad, puissant voisin, était un soutien de poids à François Bozizé, et l’avait même aidé à prendre le pouvoir par les armes en 2003 et à combattre des rébellions du Nord en 2010. Or, aujourd’hui, l’ex-président regrette : «Nous avions des relations fraternelles solides, entre le Tchad et la République centrafricaine (…) mais nous sommes surpris de ce comportement. Seules les autorités tchadiennes peuvent nous donner des explications».
Des autorités tchadiennes dont la position, dans ce conflit, a été pour le moins ambiguë ainsi que le révèle un récent rapport du groupe de recherches International crisis group (ICG) qui affirme par ailleurs que «le pouvoir tchadien est soupçonné d’entretenir des relations coupables avec la Séléka». Des allégations auxquelles n’a pas souhaité répondre le président tchadien, Idriss Déby Itno avant la tenue, dans son pays, du sommet extraordinaire des chefs d’Etats de la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (CEEAC).
Un sommet auquel aurait souhaité prendre part Bozizé qui a confié au micro de la BBC Afrique : «J’ai téléphoné hier au président (congolais) Sassou (médiateur dans la crise centrafricaine) pour lui dire que je voudrais être présent au sommet extraordinaire de N’Djamena demain (mercredi 03 mars) mais malheureusement il semble bien que le protocole de la présidence de N’Djamena a donné une réponse négative».
A sa place, le premier ministre centrafricain Nicolas Tiangaye, reconduit dans ses fonctions par le nouvel homme fort du pays Michel Djotodia, est arrivé dans la soirée à N’Djamena pour représenter le nouveau pouvoir centrafricain.
Ainsi, le Sommet qui se tient ce mercredi 3 mars à N’Djamena, dix jours après le coup de force de la rébellion Séléka, revêt une importance cruciale pour la Centrafrique. Il y a notamment été question de «l’habillage constitutionnel» qui devra donner un semblant de légitimité au nouveau régime centrafricain que la communauté internationale n’a pas reconnu. L’ambition est donc de revenir du Sommet avec quelques aménagements de la Constitution dont Michel Djotodia, le nouvel homme fort de la Centrafrique, avait annoncé la suspension. Il s’agirait dans un autre temps de «refuser la présidence de la République au président de l’Assemblée nationale à qui elle revient» normalement en cas de vacance du pouvoir, pour créer à la place «un Conseil national de transition dirigé par Michel Djotodia» et ainsi «retrouver un peu de légalité internationale», selon une source diplomatique centrafricaine relayée par le quotidien français Le Point.
