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Crimes rituels : brochette de personnalités et prémices d’une justice spectacle

contre-marche-crimes-rituelsUne série d’auditions, d’une belle brochette de personnalités, est en cours qui a donné lieu aux images télévisées d’une descente judiciaire chez Raphaël Ngazouzet, ministre délégué au Budget. L’occasion pour signaler l’amorce d’une justice spectacle et faire le point sur l’affaire Yogno, Camerounais bestialement dépecé en janvier près Ndjolé.

Après avoir alimenté la chronique durant de longs mois et suscité l’organisation d’une marche ayant enregistré la participation de l’épouse du président Ali Bongo et des autorités religieuses du Gabon, les crimes rituels viennent d’amorcer un virage qui sonne, pour le moins, comme le signe avant-coureur d’une justice spectacle.

Des caméras dans l’instruction

Ignorant la règle selon laquelle l’instruction pénale est secrète en vertu de la présomption d’innocence et en dépit des libertés de la presse et d’expression, Gabon Télévision a diffusé, le 15 mai, des images muettes de l’audition, à son domicile, du ministre délégué au Budget, chargé de la Fonction Publique, Raphaël Ngazouzet. Une audition à titre de renseignement relative à l’assassinat, le 21 janvier près de Ndjolé, du transporteur routier camerounais Amadou Yogno.

Raphaël Ngazouzet n’est cependant pas le seul à avoir eu droit à une prise de vues. Raymond Ngombéla, député de la commune de Booué, a dû piquer une colère pour s’opposer à la présence d’une caméra durant son audition à Lambaréné dans le cadre de la même affaire. À chaque fois, l’argument brandi portait sur un besoin d’archives pour la justice. Ce qu’a déjà démenti l’utilisation de la vidéo réalisée au domicile de Ngazouzet.

Présumés témoins de la livraison des «pièces détachées»

Le secret de l’instruction et la présomption n’étant pas respectés par les autorités chargées de veiller à son observation, qu’il soit donc permis d’indiquer que d’autres personnalités de la ville de Booué ont été ou doivent être entendues comme témoins, toujours au sujet de l’affaire Yogno, ce ressortissant camerounais bestialement dépecé dans le canton Ebel-Alembé, à 15 km de la ville de Ndjolé. Il s’agit de : Pascal Désiré Missongo, ancien ministre, ancien député puis sénateur, aujourd’hui haut magistrat siégeant au palais de justice de Libreville ; Raymond Ngombéla, le député de la commune de Booué sus cité ; Thomas Mellion, sénateur de la même localité, et Jean Mindoumbi, ancien ministre, ancien député puis sénateur, aujourd’hui ambassadeur au ministère des Affaires étrangères.

Des sources du tribunal de première instance de Lambaréné, confortées par les indiscrétions glanées autour des premiers auditionnés, indiquent que, dans leurs dépositions, deux des présumés assassins d’Amadou Yogno disent avoir remis la glacière contenant les organes humains à l’ancien ministre revenu à la magistrature, Pascal Désiré Missongo, à son domicile de Mindoubé. Ce, en présence de toutes les notabilités de Booué sus citées et actuellement auditionnées.

Dérobade ou vérité ? Selon les fuites de l’audition quasi-télévisée du ministre délégué au Budget en charge de la Fonction Publique, celui-ci soutient, passeport et ordre de mission à l’appui, qu’il séjournait au Maroc au moment des faits. De même, un bon nombre de ressortissants de la ville de Booué assurent que la dernière rencontre de tout ce beau monde au domicile de Pascal Désiré Missongo, remonte au mois de février 2012 à la faveur des obsèques du frère de celui-ci. Amadou Yogno ayant été tué le 21 janvier, que devrait-on penser ? Que les «pièces détachées» (les organes humains prélevés) ne se livrent pas sous le couvert du secret ?

Faisceau de présomptions

Pour mémoire, les suspects interpellés, en février dernier, et transférés à Lambaréné étaient Antoine-Médard Ossombi (37 ans), Émile Tonda (49 ans) et Philippe Iloumbou Boussengui alias Koutch (45 ans). Parce qu’il est établi que le surnommé Koutch, ex-secrétaire départemental du Parti démocratique gabonais (PDG) de la ville de Booué, est un proche du directeur général de l’Oprag et que Emile Tonda a été le directeur de cabinet de ce DG lorsqu’il était ministre délégué à la Communication, un faisceau de présomption pointe depuis un moment vers Rigobert Ikambouayat Ndeka.

L’intéressé s’en défend avec force arguments. Dans un droit de réponse fleuve au journal Echos du Nord, il écrit qu’il «n’existe pas le moindre indice matériel ou même intellectuel qui viendrait corroborer, ne serait-ce qu’un début de soupçon envers ma personne». Et de regretter plus loin, au sujet de l’affaire en cours, que «les manquements observés dans la procédure de Ndjolé sont outrageant. Mieux, jusqu’à ce jour, il n’existe aucune preuve à charge contre celui que, en publiant sa photographie à la une de votre journal, vous avez déjà choisi comme commanditaire.» Une extension de l’univers de référence que de nombreux lecteurs d’Echos du Nord n’ont pas compris. Le journal n’ayant pas fait état de l’affaire de Ndjolé, c’est-à-dire du meurtre d’Amadou Yogno.

La diffusion par Gabon Télévision de la descente des juges chez Raphaël Ngazouzet a été qualifiée de «grande première» par certains confrères, surpris par l’approche adoptée pour instruire le meurtre de ce Camerounais de 46 ans avec 17 enfants. L’affaire suit donc son cours et comme l’a si bien dit une dame qui regardait la télévision dans un café, «le Gabonais veut juste que les commanditaires et les coupables de crimes rituels soient punis conformément à la loi. Les familles des victimes ne veulent pas qu’on se moque d’elles». Affaire à suivre.

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