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Schweitzer 100 : Le point du Pr Montagnier sur le Sida

Luc-MontagnierProfesseur émérite à l’Institut Pasteur, Prix Nobel de médecine, découvreur du virus du Sida il y a trente ans, Luc Montagnier a participé au symposium scientifique international organisé, à Libreville, à la faveur du centenaire de l’arrivée du Dr Albert Schweitzer au Gabon. Il a abordé, avec Gabonreview, l’avancée des recherches liées au virus et la supposée variabilité existant entre individus et régions géographiques.

Il y a bientôt trente ans que l’isolement du virus a été fait par l’équipe de recherche du Pr Luc Montagnier à l’Institut Pasteur de France. Pourtant, à ce jour, de nombreux doutes subsistent encore dans l’esprit de plusieurs scientifiques comme dans celui des populations, plus ou moins au fait de l’avancée des recherches sur le sujet. Mais le professeur Luc Montagnier, chercheur à l’Hôpital de la Conception de Marseille (France) ne souhaite pas donner plus d’importance aux différentes allégations liées aussi bien à une hypothétique existence d’un vaccin contre le Sida qu’à une prétendue toxicité des médicaments utilisés pour le traitement des maladies liées au Sida : la trithérapie.

Sa venue au symposium organisé le samedi 6 juillet 2013 à Libreville aura donc été l’occasion, pour le chercheur, de rappeler à l’attention de ses collègues et des différentes autorités du pays que «le Sida, ce n’est pas fini. Notamment en Afrique où il y a encore beaucoup de personnes qui sont infectées, qui ne sont pas traitées» et où les traitements coûtent de plus en plus cher. En effet, relève le célèbre chercheur, «même si la recherche connait actuellement de nombreux progrès, les circonstances de l’isolement du virus sont faites sur la base des patients Français (…). On s’est vite rendu compte qu’il y avait beaucoup plus d’Africains infectés, les chercheurs travaillant dans mon laboratoire et ceux de ma fondation qui est aujourd’hui associée à l’Unesco, ont donc pris une autre orientation en se tournant désormais vers l’Afrique parce que c’est là que le problème principal existe» : c’est donc dans cette partie du monde que le gros des recherches doit être fait.

Mais pour Luc Montagnier, au lieu de critiquer sans cesse les travaux des scientifiques qui s’investissent dans la recherche depuis trois décennies, il convient de féliciter la science et les Etats qui encouragent et financent la recherche, ceci d’autant plus que «des traitements très spécifiques par le biais des inhibiteurs du virus qui permettent de garder des personnes en vie» ont rapidement vu le jour et sont désormais accessibles dans toutes les régions du monde. «Mais je l’ai toujours dit, il y a d’autres facteurs qui expliquent que le virus se développe davantage en Afrique. Ce sont des facteurs de coïnfection, pour une part, comme le paludisme, la tuberculose, les parasitoses, la pauvreté, le manque d’hygiène ou l’assimilation anormale du système immunitaire, qui favorisent la transmission du virus et sa progression chez les personnes infectées. Mais je pense qu’il y a maintenant un autre facteur beaucoup plus spécifique, un facteur infectieux et bactérien qui est davantage présent sur le continent africain qu’ailleurs. Ceci pourrait peut-être expliquer pourquoi les Africains, voire certaines populations africaines sont plus touchées que d’autres. Ce n’est pas une question liée au comportement sexuel ou de mœurs, c’est une question essentiellement une question biologique», a tenu à relever Luc Montagnier.

Au sujet de la différence des génomes entre les régions du monde, le professeur a indiqué : «il y a une grande variabilité du virus du Sida selon les zones géographiques mais également selon la génétique de la personne infectée, les ethnies différentes en Afrique peuvent être plus ou moins sensibles face au Sida». Aussi, ajoute-t-il, malgré la forte variabilité du Sida, le virus donne toujours le même type de maladies. Pour cause, explique le chercheur, «nous avons, par exemple, isolé en premier lieu le VIH1 et deux ans plus tard, le VIH2 qui, lui, apparaît plutôt en Afrique de l’Ouest, notamment en Guinée Bissau et quelque peu au Sénégal», un virus qui, selon le Pr Montagnier est assez différent du premier, bien qu’il donne les mêmes affections. En effet, et ainsi que le notent la plupart des scientifiques affiliés à la recherche sur le Sida, tout se joue au niveau du génome, ce qui fait que tout soit différent d’un individu à un autre, ou d’un lieu à un autre. Pour Luc Montagnier, les séquences des gênes dues à la contraction du virus, sa surface dans l’organisme de l’individu atteint et son enveloppe, varient énormément avec une estimation de plus de 50% de différence.

Pour le chercheur qui défend, trente après la découverte du virus, l’idée qu’il faut continuer de travailler sur l’amélioration des traitements contre la pandémie du Sida, un vaccin contre ce virus qui décime des millions d’individus depuis son apparition, serait le bienvenu. Mais à ce jour, il n’est pas prouvé qu’un tel moyen de prévention ait vu le jour dans un quelconque laboratoire du monde : «vous parlez de vaccin, c’est possible bien sûr. Mais ce n’est pas la seule voie possible, l’autre voie c’est de trouver des moyens de traitement et de thérapie relativement peu couteux qui permettent d’empêcher la transmission du virus». A cet effet, indique le professeur, il convient plutôt de se pencher davantage sur «les cofacteurs qui sont des facteurs de risque d’infection (…). En neutralisant ces facteurs, on pourra peut-être arriver à neutraliser la transmission du virus».

Par ailleurs, si le chercheur a vivement défendu les différents traitements et thérapies existant à ce jour, il s’est tout de même remémoré l’utilisation, trente années auparavant, du MD4 et de l’AZT -des médicaments consacrés au traitement du cancer- pour lutter contre le Sida et qui aggravait l’état des malades. A ce jour encore, note le Pr Montagnier, si le MD4 était beaucoup moins approprié pour guérir les maladies dues au virus, il reste que les différents inhibiteurs utilisés par les médecins sont également plus ou moins toxiques, mais sont utilisés avec beaucoup plus de précaution : «Donc il vaut mieux ne pas attraper le Sida (…). Il faut dire aux jeunes que la prévention est plus importante. Quand tu n’as pas le Sida, tu n’es pas confronté à tous ces médicaments».

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