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Mairie de Libreville : la majorité municipale tiendra-t-elle jusqu’en 2018 ?

Jean-Boniface Assélé (3e à partir de la gauche) et Rose Christiane Ossouka Raponda, le 7 février 2014 lors de leur installation à la mairie de Libreville.  © mazleck.com
Jean-Boniface Assélé (3e à partir de la gauche) et Rose Christiane Ossouka Raponda, le 7 février 2014 lors de leur installation à la mairie de Libreville. © mazleck.com
S’exprimant dans les colonnes de l’hebdomadaire «La Loupe», Jean-Boniface Assélé Dabany, leader du Centre des Libéraux-Réformateurs (CLR) et premier adjoint au maire de Libreville, a menacé d’aller rejoindre Jean Eyéghé Ndong, l’actuel chef de l’opposition municipale «pour donner une nouvelle majorité» au Conseil municipal de Libreville. Bluff ou une menace réelle ?

On n’en est pas encore là, mais Jean-Boniface Assélé va sans doute être «le caillou dans la chaussure» de Rose Christiane Ossouka Raponda, le maire de Libreville, pour les cinquante mois qui restent à l’équipe actuelle, dont le mandat court jusqu’en décembre 2018. En réalité, les relations au sommet au sein du «couple de l’exécutif municipal» ont très rapidement connu une brutale dégringolade. La machine municipale avait, en effet, fait entendre ses premiers couacs dès le mois d’avril 2014, deux mois seulement après leur prise de fonction au Boulevard Triomphal Omar Bongo. Au cours d’une réunion du CLR, Jean-Boniface Assélé avait laissé entendre qu’il ne comprenait pas la marginalisation dont le CLR était l’objet à l’Hôtel de Ville. Rose Christiane Ossouka Raponda venait alors de faire nommer un de ses proches, Joseph Moundziégou, au poste de Secrétaire général de la mairie de Libreville, sans qu’au préalable le premier adjoint au maire n’ait été informé. Depuis lors, le CLR fait bloc autour de son chef. De même, les élus et responsables PDG jouent ouvertement leur partition sans se préoccuper d’Assélé. Pourtant, ils ont besoin l’un de l’autre.

Tout est parti des élections locales de l’année dernière. A l’issue du scrutin, trois forces politiques se dégageaient. Sur un ensemble de 151 sièges de conseillers municipaux à pourvoir, le Parti démocratique gabonais (PDG) obtenait 61 sièges, les listes «Libreville pour tous» s’en tiraient avec 48 et le CLR réussissait à en avoir 42. Après moult négociations, les élus CLR ont naturellement accepté de se rallier aux conseillers municipaux PDG. Va alors naître l’alliance pour la cogestion de la commune de Libreville. Le parti fondé par Jean-Boniface Assélé s’est ainsi vu offrir trois postes dans l’exécutif municipal, à savoir les postes de premier adjoint (Jean-Boniface Assélé), quatrième adjoint (Julien Assoumou) et cinquième adjoint (Nicaise Sickout Inguendja), tandis que le PDG obtenait le poste de maire de la commune (Rose Christiane Ossouka Raponda), et deux postes d’adjoint attribués à Christian Ngoua (deuxième adjoint), et Marie-Cécile Lembémé Louma (troisième adjoint). Au final, pour ce qui est du partage de la ville, le PDG dirige trois arrondissements (les 1er, 4ème et 5ème), le CLR en dirige deux (les 3ème et 6ème), contre un à l’opposition (la mairie du 2ème arrondissement).

Assélé, bluffeur ?

Mais sitôt après la cérémonie d’installation au début du mois de février, quelques dissonances se font entendre. Jean-Boniface Assélé qui a permis au PDG de conserver l’Hôtel de Ville de Libreville avait exigé d’avoir comme attributions la gestion des finances et/ou des investissements. Il a plutôt reçu l’aménagement de la ville, tandis que ses amis obtenaient, l’un, les relations internationales et, l’autre, l’environnement. Cette distribution a été vécue comme un camouflet. Le premier. Jusqu’à présent, Rose Christiane Ossouka Raponda ne s’est pas exprimé publiquement sur la cogestion et ses relations avec ses alliés. Elle travaille avec un état-major restreint composé notamment de Joseph Moundziégou, secrétaire général de la Ville, et des membres de son cabinet. Jean-Boniface Assélé attendait aussi que ses proches accèdent à des postes de responsabilités. Il a ainsi transmis une liste de ses proches – les militants CLR – pour qu’ils intègrent les structures de la mairie (directions générales, directions et services), mais le maire n’y a pas donné suite… Deuxième camouflet. Les membres du cabinet que le leader du CLR a emmenés à la mairie ne sont toujours pas payés… Troisième camouflet. Jean-Boniface Assélé se demande alors s’il ne faut pas, après tous ces camouflets, toutes ces frustrations, «casser la baraque».

Il annonce, pour les prochains jours, la tenue d’une conférence de presse, au cours de laquelle «le CLR donnera sa position par rapport à sa participation à la gestion de la commune de Libreville». Il affirme que «nous butons sur l’application du mode de gestion de la mairie de Libreville ; il s’agit simplement de comprendre que le PDG et le CLR sont en cogestion de la commune de Libreville ; nous attendons que Madame Ossouka mette en place une commission qui traiterait de ce sujet pour en dégager des conclusions». Et d’ajouter que le CLR va amener «Madame Ossouka à comprendre et à composer. Un point, un trait. Son salut ne dépend que de «ça». Si aujourd’hui, on sort de «là», elle ne sera plus «là», et Assélé va jusqu’à menacer de s’allier aux forces de l’opposition municipale. «Nous pouvons aussi aller avec Jean Eyéghé Ndong». Sur ce point, très peu de Gabonais voient le général de police à la retraite prendre un tel risque, mais sait-on jamais… «On ne traite pas un allié de cette manière», souligne l’un des lieutenants du général. Il se demande surtout si le maire prend des instructions quelque part pour gêner le leader du CLR. Le langage semble se muscler à la «maison commune».

Y a-t-il un parfum de revanche dans cette cogestion-cohabitation ? La campagne électorale et tous les excès qui l’ont caractérisée dans le 3ème arrondissement de Libreville semblent avoir laissé des traces, des écorchures, des cicatrices. Le CLR emmené par Jean-Boniface Assélé Dabany et le PDG conduit par Laure-Olga Gondjout et Patience Marie-Joséphine Kama Dabany ne s’étaient pas fait des cadeaux pendant les joutes oratoires… Et si la liste CLR l’a emporté au 3ème arrondissement, c’est une élue PDG de cet arrondissement qui dirige la ville.

De la cogestion à la cohabitation ?

En fait, la situation qui prévaut à la mairie de Libreville ressemble plutôt à la cohabitation. En fait de gestion commune, on a droit à une juxtaposition de forces antagonistes, de forces qui s’affrontent. La cohabitation, au sens étroit du terme, s’est insérée avec une intensité si stupéfiante à l’hôtel de ville de Libreville en moins d’un an. Mais en fait, peut-être que Jean-Boniface Assélé pensait écraser Rose Christiane Ossouka Raponda, mais peut-être se révèle-t-elle plus coriace que prévu ?

Est-elle finalement une redoutable tacticienne ? Après avoir gagné face à Jean Eyéghé grâce au soutien du CLR, elle estime probablement qu’elle est le seul chef à bord. En tout cas, pour ses proches «Madame le Maire a horreur des conflits inutiles ; chaque adjoint a reçu ses attributions et missions, le maire ne demande qu’à les voir travailler». Mais cette attitude de Rose Christiane Ossouka Raponda peut paraître risquée. Et si Jean-Boniface Assélé, dont la capacité de nuisance est plus forte que celle des syndicats, quittait la majorité municipale ? En tout cas, les élus CLR indiquent que la décision de partir ou de rester peut être prise à tout moment. Donc avant décembre 2018, date des prochaines élections locales.

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