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Une offensive rebelle enflamme l’est du Congo-Kinshasa

La pluie, la boue, des rebelles, une armée en fuite et les Nations unies en perdition : toutes les conditions d’une débâcle de premier ordre sont en passe d’être réunies dans les collines du Nord-Kivu, la province extrême-orientale de la République démocratique du Congo (RDC).

Cette débâcle est avant tout celle de l’armée gouvernementale. Les Forces armées de RDC (Fardc) plient depuis plusieurs jours devant une nouvelle offensive des rebelles de Laurent Nkunda. Ce dernier, ancien militaire passé par plusieurs rébellions congolaises satellites du Rwanda voisin, appartient à la communauté tutsie du Nord-Kivu. Il a déjà pris Bukavu en 2004, la grande ville du Sud-Kivu, avant d’en être chassé par les roquettes des hélicoptères de la Monuc, la plus importante mission des Nations unies de la planète (plus de 17 000 hommes).

Dans l’intervalle, Laurent Nkunda a tenté de créer une République autoproclamée au Nord-Kivu, avant d’y renoncer. Il a échoué à prendre Goma, puis signé la paix avec Kinshasa avant de reprendre la guerre à la tête de son mouvement, le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP). Depuis fin août, on s’affronte à nouveau dans les collines du Nord-Kivu. Les hommes du CNDP (environ 5 000 hommes) attaquent les Fardc (onze bataillons), qu’ils accusent de collaborer avec les combattants hutu des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR) (6 000 hommes), en plus de milices maï-maï, collectivement hostiles aux Tutsi.

SOUFFRANCES PARMI LES POPULATIONS CIVILES

Entamée en décembre 2006, cette guerre de petite ampleur a eu quelques hauts et beaucoup de bas. Elle a suscité peu de victoires décisives, mais énormément de souffrances parmi les populations civiles, tandis que prospérait continûment un trafic de minerais mené par toutes les parties aux dépens de malheureux creuseurs pratiquement réduits en esclavage.
On ne sait si les combattants hutu des FDLR projettent vraiment de « terminer le travail » du génocide de 1994 en menaçant d’attaquer le Rwanda depuis leurs bases arrières du Kivu. Il est certain qu’ils exploitent au Congo des carrières de cassitérite ou de coltan. On ignore tout autant si le Rwanda a l’intention de téléguider, par rebelles tutsi interposés, une troisième guerre du Congo. Mais une partie des minerais de la RDC est exportée par ses soins.

Cet étrange équilibre de l’exploitation par temps de crise est désormais rompu. En quatre jours, le CNDP a opéré une poussée d’importance en direction de Goma, capitale du Nord-Kivu, collée à la frontière rwandaise. Dimanche, les hommes de Laurent Nkunda s’emparaient de Rumangabo, une base importante des Fardc au nord de la ville. Lundi, alors que démissionnait le chef militaire des casques bleus, en désaccord avec le patron de la Monuc, leur avancée se poursuivait, malgré des tirs d’hélicoptères des Nations unies.

Certains groupes de combattants du CNDP ont approché Goma à une quinzaine de kilomètres. Ce n’était pas un encerclement, mais cela a suffi pour semer un vent de panique. En ville, des manifestations violentes, sans doute manipulées, ont été à deux doigts de dégénérer gravement. Lundi, des troupes indiennes ont ouvert le feu sur des manifestants qui leur jetaient des pierres, tuant entre une et trois personnes. Mardi, ce sont les gardes de la prison qui ont tiré sur les détenus qui tentaient de se mutiner.

Mercredi matin 29 octobre, la situation militaire demeurait très incertaine. La Monuc, qui tente de s’interposer entre le CNDP et les Fardc, mais combat aussi les rebelles tutsi, pourra-t-elle tenir dans cette contradiction tout en assurant la défense de Goma? Déjà, le chef du bureau de la Monuc à Goma, Hiroute Guebre Selassie, a reconnu, à propos des hommes du CNDP qui avancent vers la ville : « Nous ne pouvons pas utiliser les hélicoptères pour les empêcher d’avancer, car ils se cachent en brousse, ils se battent sur plusieurs fronts à la fois et ils se dissimulent au sein de la population. »
La veille, Rutshuru était tombée aux mains de la rébellion de Laurent Nkunda. Des membres d’organisations non gouvernementales ont alors abandonné installations et populations en tentant de s’enfuir, mais ont été bloqués sur la route. Depuis la reprise des combats en août, il y aurait, selon les Nations unies, entre 1,4 et 2 millions de déplacés (sur une population totale de 5 millions) au Nord-Kivu, malheureux chassés de leurs villages au fil des phases d’affrontements qui se succèdent depuis décembre 2006.

La région de Goma n’est pas la seule touchée par les violences. Dans l’est de la RDC, d’autres feux viennent de s’allumer. Dans la province de l’Ituri, plus au nord, un nouveau groupe rebelle a fait son apparition. En montant un peu plus vers la frontière soudanaise, d’autres rebelles, ceux de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), originaires d’Ouganda, ont repris leurs activités.
Dans chaque cas, des négociations avaient permis d’approcher ou de mettre sur pied des processus de paix. Aucun de ces mécanismes n’est aujourd’hui activé, spécialement au Nord-Kivu où un accord de paix avait été signé en janvier. Dans ce contexte troublé, surgissent donc mille questions sur l’enchaînement des violences. Par deux fois, déjà, c’est ici, à l’extrême est, que la guerre avait commencé avant d’embraser le pays tout entier.

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