spot_imgspot_img

Gouvernement : le ministère de l’Intérieur est-il bien le ministère de la sécurité ?

Ndongou3Les deux principaux secteurs de ce département ministériel -Elections et Sécurité- n’ont pas connu les succès escomptés depuis près de quatre ans. Mieux, un institut international de sondages vient de placer le Gabon en 5è position des pays les plus marqués par l’insécurité. Quant à la décision du ministre de régulariser massivement les étrangers, elle n’est pas comprise par l’opinion ; il aurait fallu d’abord en fixer les critères et en faire la pédagogie.

Le processus électoral est bloqué. Raison principale : Jean-François Ndongou n’a pas tenu sa promesse d’octobre 2011, à la veille des élections législatives, d’organiser en avril 2013, des élections municipales et départementales «biométrisées». Devant son incapacité à s’expliquer face à l’opinion sur les «difficultés» qu’il dit avoir eues depuis près de dix-huit mois, le dossier a été confié au Premier ministre qui a du reprendre l’exercice.

Certaines personnalités du microcosme politique et de nombreux observateurs se disent convaincus que Jean-François Ndongou veut bloquer le processus de biométrisation du système électoral. Pourtant, la biométrie est, selon un politologue gabonais, «une espèce de pacte républicain destiné à refonder notre système électoral, à lutter peu ou prou contre toute volonté de fraude aux élections, un pacte citoyen où chacun doit être amené à accepter le résultat d’une élection». «Au fond, qu’est-ce que cela peut faire que Paul ou Pierre gagne une élection si c’est dans la transparence ?», se demande un militant du Centre des libéraux réformateurs. «Jusqu’à quand le Gabon ne sera donc jamais cité, dans le concert des nations, comme un pays qui organise des élections honnêtes ?»

En juin prochain, le président Barack Obama va visiter, au cours d’une tournée en Afrique, trois Etats – Sénégal, Afrique du Sud et Tanzanie – où les élections présidentielles se sont déroulées normalement. Au pays de la Téranga, en avril 2012, Abdoulaye Wade, le chef de l’Etat sortant, dont le ministre de l’Intérieur organisait le scrutin, a été battu au second tour de l’élection. Il a félicité son adversaire Macky Sall à l’issue du scrutin. Quel bel exemple de démocratie ! En Afrique du Sud, Jacob Zuma et l’ANC ont remporté en toute clarté les élections générales du mois d’avril 2009. Idem pour le chef de l’Etat tanzanien. Le Gabon n’aura pas le privilège de recevoir un tel visiteur, et on peut en imaginer les raisons.

Insécurité grandissante

Pour ce qui est de l’insécurité, c’est une lapalissade que d’affirmer qu’elle est galopante. Voir la première dame du Gabon monter au créneau contre les crimes rituels montre à quel point le phénomène est devenu insupportable. L’insécurité ? C’est le principal point noir du ministère de l’Intérieur. Quotidiennement, des corps sont découverts à travers le pays. Assassinats, crimes rituels, vols à main armée, agressions physiques, violations de domicile, incivilités de toutes sortes, que ne voit-on donc pas, que n’entend-on donc pas chaque jour ? Jean-François Ndongou assiste, impuissant, à la dégradation de l’environnement sécuritaire dans le pays.

L’institut de sondages Gallup vient de noter le Gabon comme 5è pays sur 134 en termes d’insécurité. Ce qui n’est pas du tout une bonne nouvelle pour les touristes et potentiels investisseurs. Comment renforcer l’attractivité du pays si ceux qui y viennent ne sont pas sûrs d’être protégés ? Jean-François Ndongou se bat-il pour que les forces de police disposent de moyens humains et matériels conséquents pour lutter contre le grand banditisme dans un pays où on tue dans l’impunité totale ? Combien y a-t-il d’agents de police affectés à la lutte contre la grande criminalité ? Les effectifs de l’État-major des polices urbaines d’intervention sont-ils suffisants ? La Préfecture de Police et les commissariats de police des arrondissements peuvent-ils, en termes d’effectifs et de moyens roulants et matériels, contenir le grand banditisme à Libreville ? Il semble utopique d’avoir réponse à ces questions. Le général Léon Mistoul se démène comme un beau diable, mais…

Et que dire de la Protection civile, un autre secteur de ce ministère ? Des calamités naturelles ont eu lieu à Mouila et dans diverses localités du pays il y a plusieurs mois. Un grand nombre de Gabonais attendent toujours l’assistance que leur a promise l’Etat par le biais du ministère de l’Intérieur. Mais peut-être croit-on là-bas que seule l’annonce des résultats des élections concerne ce département ministériel !

Longue expérience gouvernementale, mais…

De fait, Jean-François Ndongou est l’un des ministres les plus contestés, pas tellement pour les «décisions antidémocratiques» qu’il est souvent amené à prendre (interdictions de marches, manifestations antigouvernementales brutalisées, légalisation tardive des partis politiques, etc.) – sur ce créneau, il n’est pas le premier à le faire – mais parce qu’il ne donne pas à voir en lui des soupçons de compétence dans ce qu’il fait.

Seule bonne nouvelle : le ministre de l’Intérieur et de l’Immigration vient de décider de régulariser des milliers de ressortissants étrangers, essentiellement d’Afrique de l’Ouest et du Centre. Mais encore, est-ce vraiment une bonne nouvelle ? L’opération passe plutôt comme un «appel d’air aux réseaux à intensifier leurs pratiques». Dans d’autres pays, lorsque l’on parle de régularisation d’étrangers, on met en avant des critères : on régularise ceux qui sont entrés dans le territoire avec tout au moins un visa (de court séjour) et après un certain nombre d’années. Sinon, on reste soumis à une expulsion probable, à une «reconduite à la frontière». Pour Jean-François Ndongou, le seul critère est que… l’argent de la régularisation entre dans les caisses du Trésor pour payer des primes aux agents de police… et à d’autres. Qu’on soit entré au Gabon par pirogue ou par voiture non contrôlée, on se fait régulariser.

En fait, en dépit de sa longue expérience gouvernementale – depuis 13 ans et 6 mois, il est de toutes les équipes gouvernementales-, qui aurait pu le bonifier, le premier ministre de l’Intérieur à avoir dissous un parti politique dans le pays ne semble disposer d’aucune stratégie, d’aucune méthode, d’aucun plan, pour accomplir avec efficacité les missions qui lui sont assignées. Et ça fait quatre ans que ça dure ! «Ce ministère a besoin d’un nouveau souffle», selon le mot d’un gouverneur de province.

Exprimez-vous!

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

spot_imgspot_img

Articles apparentés

spot_imgspot_img

Suivez-nous!

1,877FansJ'aime
133SuiveursSuivre
558AbonnésS'abonner

RÉCENTS ARTICLES