Intervenant dans le cadre du New York Forum Africa (NYFA), tenu dans la capitale gabonaise les 14, 15 et 16 juin 2013, le président de la Chambre du Commerce du Gabon et directeur général du groupe de distribution de gaz et de produits pétroliers, PétroGabon, Jean-Baptiste Bikalou, a répondu aux questions de Gabonreview.
Jean-Baptiste Bikalou, qui assure avoir aimé l’initiative du NYFA, définit les voies et mécanismes à suivre pour que les petites et moyennes entreprises passent de l’informel au formel. Il revient sur le forum Futurallia, à Istanbul (Turquie) auquel les entreprises de la Chambres de commerce ont pris part.
Gabonreview : Monsieur le président, vous avez participé à un débat dans le cadre du NYFA portant sur le thème «de l’économie informelle à l’économie informelle». On a suivi que le Rwanda a développé des mécanismes et des stratégies capables de relever et de ramener ce secteur informel dans le formel. Il se présente donc comme un modèle. Comment apprécier cette initiative et qu’en est-il au Gabon ?
Jean-Baptiste Bikalou : Effectivement, au cours du débat, il y a eu deux thèmes qui se sont entrechoqués. Il y a un, qui est la régulation et l’autre qui est la simplification. Il n’est pas dit que c’est le Far West où on devrait faire n’importe quoi. On va dire, pour faire le commerce au Gabon, on va faire comme ça, c’est comme ci et c’est comme ça. Mais simplement, quant on met en place la réglementation, parce que là c’est vraiment important de savoir que dans tous les pays qui ont émergé sur le plan économique, l’administration a été la locomotive l’émergence. C’’est-à-dire que l’administration se met au service de l’économie, se met au service de l’entreprise pour qu’elle soit performante et non le contraire.
C’est en cela que l’administration doit traiter l’entrepreneur comme un client et non comme quelqu’un qui est un usager, qui doit à tout prix venir demander un simple service. Je prends un exemple : à l’époque avant PétroGabon, le gaz, pour l’acheter, il fallait aller en station service. Nous Pétro, quand nous sommes arrivés, nous nous sommes dit que le gaz, il faut l’amener auprès du client. On l’a amené au quartier et depuis là, on l’a facilement au quartier. C’est la même logique également de dire, plus tôt que d’avoir une administration qui dit le promoteur doit venir me voir au siège, c’est dire qu’en tant qu’administration, moi derrière, j’ai deux objectifs : Je veux effectivement que les contribuables comme les entreprises contribuent au budget du développement du pays en payant les impôts et d’autres choses en même temps, je veux qu’elles soient prospères parce que, plus elles vont gagner d’argent, plus elles vont payer d’impôts dont j’ai intérêt moi, en tant qu’administration à ce qu’elles soient performantes.
Vous voyez que la logique change complètement et de l’autre côté également c’est dire comme es Anglais «time is money». Le temps est la denrée la plus rare que nous gérons. Il n’y a pas d’endroit où on achète le temps. L’homme d’affaire pour lui, le temps c’est vraiment précieux. Quand on va s’installer dans l’informel c’est pourquoi ? C’est parce qu’on ne veut pas perdre du temps. On se dit que s’il faut se déplacer pour pouvoir arriver dans un bon bureau et pour avoir le bon service, on va perdre quatre à cinq jours. Et pendant ces quatre à cinq jours la boutique est-elle fermée ou pas ?
Alors que si on se dit en tant qu’administration, je souhaite que les entrepreneurs fassent leur boulot, dans ce cas, ils sont installés où? Je vais vers eux pour dire voilà ce qu’il vous faut. C’est clair que cette personne-là sera heureuse. Il va apprécier l’administration pour sa proximité, mais quand on parle de proximité c’est là également qu’il faut pouvoir intégrer les nouvelles technologiques qui arrivent.
On a parlé longuement en disant qu’aujourd’hui on a l’internet, chacun de nous a un téléphone mobile. Il faut donc faire en sorte qu’à travers cela on puisse payer sa patente. Il faut qu’on soit imaginatif derrière en terme de comment être en proximité avec le contribuable ou l’opérateur économique pour lui faire gagner du temps mais également pour pouvoir toucher le maximum de personnes. C’est là le challenge. L’administration doit jouer son rôle, nous accompagné.
Vous êtes le président de la Chambre de commerce du Gabon et on sait que le New York forum Africa 2013 voudrait que la croissance de l’Afrique soit repositionnée sur la jeunesse du continent. Alors vous, au niveau de votre institution, que faites-vous concrètement pour pouvoir vous arrimer à ce terme-là ?
Vous savez encore une fois, je vais parler du Gabon des contrôles où chaque administration vient faire son contrôle. Et après c’est une perte de temps, c’est une perte de temps où on rançonne les gens, c’est comme la réflexion pour qu’est-ce qu’on va faire ? C’est une réflexion globale. Nous devons nous mettre ensemble et notre rôle en tant que Chambre de commerce est de conseiller l’administration, c’est de conseiller le gouvernement. On ne va pas dire, nous Chambre de commerce, qu’on a fait ci ou ça, non.
Tout à l’heure, on a écouté nos collègues du Rwanda, ils nous ont expliqué ce qu’ils font, comment ils créent une entreprise en six heures. Ils ont dit, la question c’est : comment allons-nous faire pour nous aussi réussir à créer une entreprise en six heures ? C’est ça le grand challenge. Ce n’est pas unique le problème du CDE (Centre de développement des entreprises), de la DGI (Direction générale des impôts), de la Chambre de commerce ou de tel ministère. C’est ensemble qu’on se mobilise pour dire, nous aussi au Gabon, on peut créer une entreprise en six heures.
C’est en croyant à l’autre, en respectant ses idées, ses réflexions et non en disant il ne contrôle pas bien, moi aussi je dois pouvoir contrôler. Quand je parle de contrôle, mais c’est quand on parle de «one-stop shop» en question pour le guichet unique. C’est l’administration centrale comme administration décentralisée : les communes, les assemblées départementales et autres. Comment on se met ensemble pour partir du principe qu’une entreprise qui gagne du temps, qui gagne de l’argent va pouvoir mieux payer ses impôts. Si elle paie ses impôts, l’administration aura plus de moyen pour être encore plus efficace et il faut pouvoir enclencher le cercle vertueux.
En cela quand vous dites qu’est-ce nous faisons ? La question est bien posée, mais il y a des grands ateliers. C’est vrai qu’actuellement, on apprécie l’ouverture qu’il y a du point de vue de l’administration où lors de nos ateliers, nous secteur privé, sommes là avec les différentes administrations pour voir comment pouvoir améliorer le climat des affaires. Le vrai terme c’est celui-là c’est comment améliorer le climat des affaires. Parce que si on a un climat qui est amélioré les affaires seront plus florissantes. Voilà un peu le grand challenge.
D’un forum à un autre, que peut-on attendre du Futurallia où vous avez représenté la Gabon avec la Chambre de commerce ?
Vous savez un forum, dans ma logique à moi, c’est d’abord un endroit où on créer un réseau, où on fait fortifier un réseau, où on rencontre des gens. L‘initiative dure cinq ou dix minutes, mais je sais qu’au niveau de la Turquie, en ce qui concerne la distribution des produits pétroliers, j’ai rencontré des partenaires. On a pris des contacts et maintenant en dehors du forum, on va pouvoir échanger et au terme de ces échanges on peut signer des partenariats qui peuvent être techniques, commerciaux ou de fournitures.
Mais encore une fois c’est important. C’est important quand on prend nos collègues de l’Afrique anglophone. Prenons l’Afrique de l’Est, ce type de forum-là, ils y sont en permanence. Sur le fond, ils ne sont pas idiots, ils ont comprit que celui qui est absent de la scène ne doit pas se plaindre qu’on ne le fasse pas jouer. Il faut être là où ça se décide et c’est là dans ce type de forum qu’on rencontre de multiples personnes, où on se fait connaître, où on rencontre des gens et à partir de là, on échange des cartes, parce que sans un forum comme celui-ci (NYFA) il y a des cartes qu’aujourd’hui je n’aurai pas. Mais maintenant que j’ai les cartes, je pourrais après échanger avec eux.
Pour terminer avec le New York Forum Africa, quelle appréciation en faites-vous ?
C’est la deuxième édition du NYFA. Il ya quelque chose qui m’a impressionné dans cette édition : c’est le fait qu’à l’ouverture hier (le 14 juin 2013), on ait eu au même endroit, les hommes d’affaires qui sont venus à Libreville et l’ensemble des chefs d’Etat de l’Afrique Centrale. Pour moi c’était plus puissant parce qu’aucun autre pays de la sous région ne se développera, n’émergera tout seul. C’est ensemble qu’on émergera parce que l’homme d’affaires, quand il vient, il a besoin d’un diviseur.
L’homme d’affaires qui est arrivé à Libreville sait désormais que venir investir au Gabon, c’est accéder au marché de l’Afrique centrale. Cela change tout, c’est un marché de quarante millions d’habitants. C’est déjà différent alors que s’il n’y avait que le Gabon, c’est un marché qu’un million d’habitants. Donc ce n’est pas la même division. Quand on prend les marchés sous régionaux, les zones douanières qui existent en Afrique Australe, en Afrique de l’Est, ces zones douanières ont été tirées par les affaires, ce sont les hommes d’affaires qui les ont tirés devant pour se mettre ensemble.
Quand on dit dans le même temps que les unités douanières en Afrique de l’ouest et en Afrique centrale ont été tirés par l’institutionnel, il est clair que le temps de l’institutionnel peut ne pas être celui de l’homme d’affaires. Quand on regarde par rapport à nos frères de l’Afrique Australe et de l’Afrique de l’Est en termes d’intégration, on a perdu un peu de temps et hier encore j’étais heureux d’entendre le chef de l’Etat (Ali Bongo Ondimba) dire qu’il n’y a pas de retour entre nos pays. Il est clair qu’effectivement si on commence à construire des routes bitumées entre Libreville et Brazzaville, entre Libreville et Yaoundé, entre Yaoundé et Bangui et autres, à partir de là où c’est bitumé, on va pouvoir échanger, on va commercer.
Et si on commerce, la libre circulation des personnes et des biens se fera normalement, elle se fera non pas comme ça à partir de zéro. Ce sera parce que j’ai des collègues hommes d’affaires au Cameroun, au Congo, en RCA, au Tchad que je peux les appeler pour demander qu’on fait quoi ensemble. Voilà ce qui est vraiment important et moi, ce qui m’a frappé hier lors de cette ouverture : c’est d’avoir les chefs d’Etat là, en face des hommes d’affaires. Pour dire que quand on vous dit la Cemac (Communauté économique de l’Afrique centrale) ce n’est pas une vue d’esprit, tout les chefs d’Etat sont là, ils sont engagés, eux-mêmes. Ils l’ont dit hier qu’ils n’ont eu jamais l’occasion d’être en face des hommes d’affaires.
Quand je prends un projet simple comme Air Cemac on en parle souvent, mais… Hier j’entendais les présidents parler, je me suis dit que ce projet va peut être décoller parce qu’on se rend bien compte que si on veut commence à commercer, il le faut. Aujourd’hui pour aller de Douala à Libreville, je l’ai fait, il y a au moins de trois mois, de Douala j’ai pris un avion pour aller à Lomé et de Lomé j’ai pris un autre avion pour revenir à Libreville, Libreville-Douala c’est moins de cinquante minutes, si nous voulons nous intégrer, ce sont des choses à pouvoir régler. Pour moi c’est un élément puissant pour ce forum.